Chaire Francqui 2021-2022
Programme
- Leçon inaugurale : "Faire histoire avec les animaux", le lundi 25 avril 2022, à 17h10, au L21 (Faculté de Philosophie et Lettres). La leçon sera suivie d'une réception
- 2e leçon : "Penser en présence des animaux", le mardi 26 avril 2022, de 14h00 à 16h00, au L22
- 3e leçon : "Territoires animaux", le mercredi 27 avril 2022, de 14h00 à 16h00, au L22
- 4e leçon : "Les traces comme écritures animales", le jeudi 28 avril, de 14h00 à 16h00, au L22
- 5e leçon : "Écrire avec les animaux", le vendredi 29 avril, de 14h00 à 16h00 (Cette séance est un atelier d'écriture collective à partir des leçons précédentes).
1 - Faire histoire avec les animaux (Séance inaugurale)
Il nous aura longtemps été difficile d’imaginer que les animaux puissent un jour devenir sujets d’histoire — si ce n’est dans le régime de la lente et froide histoire de l’évolution. On avait délégué ce soin aux poètes et aux romanciers. Mais des propositions de plus en plus nombreuses, qu’elles émanent d’historiens, de philosophes, d’anthropologues ou d’autres chercheurs, ont rompu avec cette idée que les humains seraient les seuls et véritables acteurs des événements. Avec tantôt l’hypothèse que les animaux nous auraient appris quantité de choses, ou que certains d’entre eux nous auraient en fait domestiqués, voire qu’ils seraient aux origines de l’art ou de l’invention de formes d’écriture…
2 - Penser en présence des animaux
Dans un texte désormais célèbre, Jacques Derrida adressait aux philosophes, et plus largement aux chercheurs, le reproche de n’avoir jamais pu se voir « vu » par un animal, de n’avoir jamais croisé le regard d’un animal posé sur eux. Quelques années plus tard, Donna Haraway répondra à Derrida : n’a-t-il pas négligé les pratiques autres que les « technologies d’écriture » ? Certes, Haraway le souligne, parler « en présence » n’offre aucune garantie : on peut travailler sur les animaux et l’on peut travailler avec eux. Mais, dans ce cas, ne s’agirait-il pas de se défaire d’abord de l’idée qui a souvent conduit les recherches en sciences humaines à propos des animaux, celle de « représentation » ?
3 - Territoires animaux
Au début du XXe siècle, un nouveau champ de recherches s’ouvre en ornithologie : l’étude du comportement territorial. En quelques années, les observations et les théories vont se multiplier. D’une espèce à l’autre, d’un groupe à l’autre, de nouvelles manières de faire territoire apparaissent, bien plus complexes que ce que les ornithologues pouvaient imaginer. Les schèmes familiers de l’éthologie impriment leur marque sur les hypothèses : compétition, agression, utilité pour la survie,... Mais il semblerait que les territoires résistent à ces explications trop simples. Et qu’on devrait peut-être prendre en compte l’enthousiasme des oiseaux, leur sens de la beauté, voire leur goût du spectacle.
4 - Les traces comme écritures animales
Le philosophe William James insistait sur le fait que les choses terrestres non seulement « ont des vies personnelles » mais qu’elles racontent de véritables récits qui constituent la trame de l’univers. Depuis lors, quelques philosophes et quelques historiens se sont attachés à prendre acte de la possibilité, notamment pour les animaux, d’activement « signifier », par le biais de traces et de marques, sur un mode que Michel Serres associera au régime de l’écriture.
5 - Écrire avec les animaux
Cette dernière séance prendra la forme d’un atelier d’écriture collective d’une fiction mettant en scène des acteurs animaux, au départ des théories qui auront été développées au cours des précédents séminaires.